Destin

Lorsque j’étais enfant je ne connaissais même pas ce mot: destin! Je n’avais pas encore expérimenté la mort dans notre famille et je ne savais pas ce que cela signifiait « être mort », ni ce que ça impliquait pour les vivants! Jusqu’au jour où elle toucha quelques membres proches de notre famille. Notre grand-père paternel, un oncle musicien, l’oncle Jean, qui chantait, jouait et riait avec nous et jouait pour notre plaisir, le mien en tout cas, du violon… et notre oncle Joseph! Tous sont morts dans les années 61-62. Je n’ai retrouvé dans ma mémoire, de notre oncle Joseph, qu’une silhouette courant et riant dans le corridor…. et plus rien. Il est décédé dans la chambre qu’il occupait, sous les combles d’un vieil immeuble. Son voisin de chambre s’est gazé, les cloisons étaient en bois, rien de bien épais, et lui dormait….de l’autre côté de la cloison… Au matin, lorsque ma grand-mère, ne le voyant pas sortir de sa chambre, alla frapper à sa porte, elle fut surprise par l’odeur de gaz qui régnait là, elle ouvrit la porte et trouva son fils, endormi, paisible…. mort! Je ne sais pas quel âge il avait, 38…40 ans??? il était plus jeune que papa. Ce fut un choc pour ma grand-mère et toute notre famille. Le destin de ma grand-mère basculait encore une fois…. elle était à nouveau seule, et ce décès la bouleversa tant, qu’elle ne trouva plus de raison de se lever le matin pour aller travailler, prendre soin d’elle, se nourrir convenablement…. Après quelques temps, des mois ou des années, je ne sais pas, mes parents voyant qu’elle ne pouvait plus subvenir à ses besoins, décidèrent, en accord avec elle, de la faire entrer au home de Saignelégier. Là elle serait nourrie, et entourée.
Elle venait régulièrement à la maison, maman lui confiait des petites tâches ménagères: plier du linge, équeuter les haricots, ou l’aider à préparer les légumes pour le repas. Elle retrouvait un sens à sa vie, elle était utile à quelqu’un et surtout aimée et appréciée simplement comme elle était!
Notre maman était vraiment généreuse et aimante. Elle n’a jamais prétexté la maladie pour se soustraire à une tâche. Elle accueillait sa soeur, veuve, avec ses 3 filles pour les week-ends, ou pendant les vacances des filles. Elle donnait sans compter, elle trouvait toujours la force pour s’acquitter de ses obligations. Elle expérimentait quotidiennement que Dieu ne demande jamais plus à une âme que ce qu’elle peut supporter. Elle était reconnaissante pour tout ce que la vie lui offrait. Les bonnes choses, comme les plus difficiles!
Pour mes parents, c’était clair, le destin était l’affaire de Dieu, Lui seul savait…..ce que eux ignoraient! Ils disaient, autant papa que maman: « on ne comprend pas toujours tout de suite pourquoi les choses arrivent comme elles arrivent, mais il faut l’accepter ». Que de leçons de sagesse avons-nous entendues de leurs bouches!

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