Le temps passait, les restrictions d’après-guerre se faisaient toujours sentir. La nourriture était comptée, les moyens financiers limités, il fallait « jongler avec l’argent » pour nouer les deux bouts! Maman choisissait de se priver de fruits ou de laitage, car disait-elle, « il ne fallait pas que les enfants en manquent. » Les naissances se suivaient. La deuxième fille était née en août 1947 et bientôt la troisième se profilait…. pour naître en septembre 1948. Chaque naissance était une réjouissance et une fête! Ni les difficultés de l’époque, ni la fatigue, ni la surcharge de travail ne pouvaient entacher le bonheur de cette famille grandissante. L’aînée a dû grandir vite! A tout juste trois ans, la voilà déjà dans le rôle de la grande soeur à responsabilités! Veiller sur les petites…. accomplir des petites tâches pour seconder cette maman qui avait bien à faire! Entre le jardin, les lessives, la confection de petits habits, le ménage et les 3 enfants, il ne lui restait pas beaucoup de temps et pourtant, elle en trouvait toujours pour nourrir ses « chérubins » de tendresse et d’amour. Elle était organisée, exigeante, stricte et si douce!
Le matin, la maisonnée se levait de très bonne heure, du genre 5 heure 30! Et le soir, les enfants étaient couchés de très bonne heure aussi! Les soirées étaient réservées à la couture, au tricot, au pliage des langes, à la stérilisation des légumes ou à terminer ce qui n’avait pu être fait dans la journée. Le temps passait, au début 1949 le quatrième enfant s’annonçait déjà!
L’appartement devenait exigu pour cette famille grandissante. Il leur faudrait trouver autre chose, plus grand, plus pratique et pas trop cher! La chance leur souriait encore, il trouvèrent un appartement, par l’intermédiaire de l’employeur de mon père, dans un immeuble encore en construction. L’aubaine! un quatre pièces – cuisine et salle de bains! Ils pourraient emménager à l’automne 1949!
Quand, de retour de la maternité de cette quatrième petite fille, en novembre, ils s’installèrent dans leur nouvel appartement, ma mère était épuisée! Chaque jour, elle demandait la miséricorde de Dieu pour pouvoir faire face à ses obligations et ne pas s’écrouler! Grande et forte était sa foi: « Ta miséricorde, Seigneur, seule je n’y arriverai pas » était sa prière!
Cette quatrième naissance fut un tournant dans la santé de notre maman. Elle connu ses premières crises d’épilepsie. Les grossesses répétées, le manque de sommeil, les soucis, la charge de travail à accomplir tout cela comptait dans la balance. Ses courts séjours à la maternité étaient ses seules « vacances » C’était le seul temps où elle pouvait se reposer, dormir et « décompresser ». Elle qui avait eu tellement besoin de savoir, avant de se marier, ce qu’il adviendrait si elle tombait malade, voilà qu’elle était touchée par cette maladie encore mal connue à cette époque. Mon père était inquiet, que pouvait-il faire, lui, pour palier à cela? Rien! Il avait sa part de responsabilité, de travail à accomplir; il fallait qu’il assure un salaire convenable pour nourrir cette famille. Il avait besoin du soutien de son épouse et de sa présence à ses côtés! Ensemble ils s’en remettaient à Dieu, implorant Sa bonté et Sa générosité, demandant la Grâce de pouvoir élever au moins tous ces enfants! Ils trouvaient leur force dans la prière et la foi. Ils faisaient partie de ces gens qui ne doutent pas, qui ont confiance absolue, qui ne baissent pas les bras et ont certitude qu‘il ne leur sera pas demandé, à aucun moment, plus qu’ils ne peuvent assumer et porter! C’est dans cet état d’esprit que nous avons été éduqués. C’est cet exemple que nous avons vu toute notre vie avec eux! C’est cette conviction et cette démonstration de la pratique de la foi que nous avons expérimentées grâce à eux! Ils étaient des Témoins vivants des lois divines! Ils étaient des Pratiquants de chaque instant ! Ils n’ont cessé de louer, de glorifier et de remercier Dieu pour tout ce qui leur advenait. Ils ont fait de leur vie une Louange à Dieu! Ils nous ont montré et ouvert le chemin de La Voie de la Simplicité!
Grand et précieux est l’héritage spirituel qu’ils nous ont laissé! Grande est notre responsabilité pour honorer ce leg! MERCI à vous, parents si bienveillants!
Archives mensuelles : décembre 2013
La famille
Avec l’arrivée de leur premier bébé, la vie de mes parents, comme celle de tous les parents du monde, prenait un sens nouveau! Débutait leur apprentissage de parents et s’ouvrait une porte : celle de la famille! Leur famille.
Avant leur mariage, mes parents avaient posés les bases nécessaires pour pouvoir s’engager en toute confiance. Ma mère avait eu besoin de savoir et d’entendre si mon père était prêt à la garder même si elle devait, un jour, venir très malade. Cette question ne se posait même pas pour mon père! Il ne reculerait devant rien! Elle pouvait être tranquillisée. Pour mon père ce qui importait le plus était de pouvoir offrir à leurs enfants un foyer uni et aimant! Ces bases établies, ils s’étaient engagés avec une foi et une confiance absolues. Voici donc que prenait forme cette famille tant souhaitée! Ils se sont investis corps et âme, pour réussir si bellement ce qui était si cher à leurs yeux et à leurs coeurs.Ils ont unis tous leurs efforts à la cohésion de leurs actes!
Les difficultés rencontrées durant la période d’après-guerre, étaient bien différentes à vivre que celles que nous rencontrons aujourd’hui. En ce temps il fallait assurer le minimum vital, aujourd’hui les préoccupations sont différentes. Il faut assurer le superflu! Quel changement!
Chaque famille avait l’obligation de cultiver un lopin de terre pour s’assurer au minimum des pommes-de-terre! Mes parents, comme bien d’ autres, ont dû faire preuve d’ingéniosité parfois pour finir le mois! Mais ils étaient heureux! Jamais les difficultés ne les ont séparés, au contraire! Ils affrontaient toute situation ensemble pour réussir ce à quoi ils s’étaient engagés! Ce bébé était le joyau qu’ils chérissaient! Ma mère avait une fibre particulièrement maternelle et aimante. Elle remerciait encore et encore pour cette famille qui déjà promettait de s’agrandir…. six mois après la naissance de ce premier bébé, un deuxième enfant s’annonçait! Les occupations ne manquaient pas.
Je ne sais plus à quel moment mon père a arrêté le travail aux champs pour se consacrer à la livraison du charbon. Il était toujours employé par la Coop. Cette nouvelle fonction lui permettait de gagner un peu plus d’argent, ce qui était bien venu! Il livrait le charbon dans pratiquement toutes les maisons du village. Il charriait les sacs de 50 kilos du train dans son camion, du camion à la cave ou au galetas des gens. Chaque sac était porté plusieurs fois avant d’arriver à sa juste place! Je ne sais combien de tonnes son dos a porté! Il ne comptait pas les efforts, ni ne se laissait impressionner par le pénible des situations. Il était content et heureux! Il avait du travail et de quoi nourrir sa famille. Il avait TOUT ce dont il avait besoin! Cette attitude et aptitude a pouvoir trouver satisfaction et plaisir a accomplir toute tâche le caractérisait, et cela m’a toujours beaucoup touchée. Il était serviable et particulièrement bienveillant avec les personnes âgées. Il les tenait en grande estime! Sa gentillesse touchait le coeur des gens. Il était un porteur de charbon, noirci de poussière, et pourtant il apportait la lumière dans les coeurs et son visage rayonnait! Il n’a jamais lu de livre, jamais pratiqué la méditation, jamais suivi de séminaire, ne s’est pas soucié de prendre du temps libre pour lui et s’adonner au développement personnel, non, rien de tout cela, et pourtant il avait l’âme pure et le regard limpide, la poignée de main ferme et franche. Il pouvait regarder les gens en face et pénétrer leur regard en toute sérénité. Il était un père et un mari aimant. Il est vrai qu’il n’avait pas beaucoup de temps à passer avec son enfant et sa femme, mais quand il était là, il était présent!
Ce bébé grandissait, progressait, était la fierté de ses deux parents! Chacun avait trouvé sa place dans cette nouvelle structure. Les mois passaient, la nouvelle grossesse avançait il fallait s’organiser pour cette venue. La grande devait être propre le plus vite possible, c’était en 1947, les langes se lavaient à la main!!!
Les premières pages
Voilà que débutaient les premières pages de leur livre de Vie de couple et de parents!
Une fois installés dans leur premier appartement, bien modeste, il faut le reconnaître, leur vie s’organisa tout naturellement! Cet appartement comprenait 2 chambres, une cuisine, des WC, et peut-être une petite salle de bain, mais je n’en suis pas certaine! Le chauffage consistait en un petit poêle à charbon dans la cuisine. La première année de leur vie de couple, ma mère effectuait, à la maison, un travail d’horlogerie. L’argent ainsi gagné permettrait de mettre « du beurre dans les épinards » comme disait l’adage! mais surtout, elle serait occupée!!! Elle qui avait eu l’habitude de travailler au ménage et à l’atelier, devant s’organiser pour tout terminer à temps…. Elle ne pouvait pas s’imaginer rester à ne rien faire ou presque rien! Quand elle faisait la lessive, elle devait descendre sa corbeille de linge au fond du jardin où se trouvait le lavoir. Elle frottait à la main, comme ça se faisait encore beaucoup à cette époque. Il m’est difficile de m’imaginer la tâche réelle qu’avaient les femmes! Pourtant quand elle parlait de ce temps, elle le faisait toujours avec respect et relevait les beaux côtés. Elle était optimiste maman! Elle était heureuse!
Mon père rentrait bien souvent très tard dans la nuit pour repartir au petit matin, et ma mère, elle, attendait son retour pour se coucher et se levait pour lui préparer son petit déjeuner! C’était disait-elle, tout à fait normal d’agir ainsi!
Quelque temps après leur installation, ma mère fut enceinte de ma soeur aînée, ils en étaient tout réjouis! Le temps de cette grossesse passa bien vite! Il y eut durant cette même période, la maladie de la mère de maman; elle avait contracté un cancer et souffrait beaucoup. Cet état bouleversait ma mère et l’inquiétait. Verrait-elle leur enfant? Pourrait-elle s’en réjouir avant de partir? Mes parents l’espéraient de tout leur coeur! Pour mon père tout autant que pour ma mère ce fut une étape éprouvante; cette femme qui lui avait ouvert les bras si grands (à mon père) était en train de mourir à petit feu et ils ne pouvaient rien faire pour la soulager! Chaque fois que mon père pouvait prendre un congé et qu’il y avait assez d’argent pour le train, ils descendaient voir cette maman mourante. Elle espérait avec eux avoir le plaisir et la grande joie de connaître au moins un petit-enfant! Le terme arriva, ma grand-mère était toujours là, Dieu merci! Elle a vu sa première petite-fille, a pu la prendre dans ses bras, la nourrir de son amour de grand-mère et décéda un mois plus tard. Bonheur et tristesse tout à la fois! d’une part la naissance de cette petite, et d’autre part le décès de cette si chère maman et belle-maman! Mon père a gardé un souvenir si lumineux de sa belle-mère et un respect si grand que nous pouvions les sentir, presque les palper! Cette grand-mère nous a donc été racontée avec amour et nous la percevions comme une « grande dame »!
Ce qui me touche le plus dans la vie de mes parents, c’est l’attitude qu’ils ont eue, dans chaque situation! L’acceptation de tout ce qui arrivait, les bonnes nouvelles comme les épreuves! Il y a un enseignement à prendre, à entendre, à reconnaître. Il y a cette simplicité pure qui leur faisait dire : « notre vie est ma fois bien banale! Nous ne faisons rien d’extraordinaire, nous assumons simplement nos engagements et nos responsabilités. Nous ne voulons surtout pas être prétentieux ni être « à la langue » des gens! » Ils étaient humbles, vrais en tout et naturellement bons! Quel bonheur de les avoir eu pour exemple!